Titre original : The Purple Rose of Cairo
Réalisation : Woody Allen
Scénario: Woody Allen, inspiré de la pièce Six personnages en quête d'auteur de L.Pirandello
Images : Gordon Willis
Musique : Dick Hyman
Acteurs principaux : Mia Farrow, Jeff Daniels, Danny Aiello, Dianne Wiest, Van Johnson
Genre : comédie
Durée : 85 minutes (1h 25)
Dates de sortie : 1er mars 1985 aux États-Unis
Dans le New Jersey des années 30, Cecilia (Mia Farrow) oublie la grisaille de sa vie de couple et de la crise économique en allant au cinéma. Sans hésiter à voir plusieurs fois un même film,
comme La rose pourpre du Caire. De quoi attirer l’attention de l’aventurier Tom Baxter (Jeff Daniels), qui quitte l’écran pour venir lui déclarer son amour. Panique chez les autres
protagonistes et les producteurs, plus énervés qu’étonnés de se retrouver avec un "personnage en cavale". Douceur pour Cecilia et Tom, lequel découvre non sans surprises le monde réel, où
les voitures n’attendent pas leurs conducteurs le moteur allumé, où les gens font l’amour sans fondu et où les femmes enceintes ont de drôles de ventres arrondis.
Avec La rose pourpre du Caire, Woody Allen faisait sortir un personnage de l’écran et rappelait, une fois encore, que la vie ne vaut d’être vécue sans
magie. Une pure comédie. Un bonheur.
Publié sur le site aVoir-aLire par Frédéric Mairy
Faire littéralement sortir un personnage de l’écran : y penser était déjà beaucoup. Le tourner était encore mieux. Woody Allen l’a réalisé avec beaucoup d’énergie et de simplicité, profitant de toutes les richesses offertes par sa géniale trouvaille. Qu’il s’offre même le luxe de retourner, en faisant entrer Cecilia dans La rose pourpre du Caire, où le champagne n’en est pas. Car tout cela n’est que du cinéma, Tom Baxter compris. Aussi l’amoureuse finira-t-elle par lui préférer Gil Shepherd, son interprète, venu dans le New Jersey pour ramener le fugitif à la raison. Mais sitôt le calme revenu dans le film, l’acteur repartira seul à Hollywood...
"Les méchants, disait Woody Allen, ont sans doute compris quelque chose que les bons ignorent." Aux bons reste alors le rêve. Reste l’illusion d’un monde plus beau, plus gai, plus heureux. Ce n’est pas rien. C’est même l’un des thèmes majeurs de l’oeuvre de Woody Allen.
Gil Shepherd est parti, Tom Baxter aussi. Cecilia a quitté son mari. En pleurant, elle entre dans le cinéma. C’estLe danseur du dessus, de Mark Sandrick. Avec Fred Astaire et Ginger Rogers. Ils s’aiment. Ils dansent joue contre joue. Ils chantent Cheek to cheek, d’Irving Berlin, qu’Ella Fitzgerald et Louis Armstrong reprendront un jour. Et dans un plan de toute beauté, les larmes de Cecilia s’en vont, laissant la place aux reflets des lumières magiques de l’écran.
Ce n'était pas un Woody Allen "normal".
Publié sur LeFigaro.fr par A.P.
La Rose pourpre du Caire fut longtemps considérée comme le meilleur film de Woody Allen. Aujourd'hui, il partage sa première place - si l'on en croit les spécialistes, qui peuvent se tromper
- avec Match Point. La Rose pourpre étonna à sa sortie, en 1985. Ce n'était pas un Woody Allen « normal ». Le réalisateur qui aimait mettre en scène son personnage de névrosé intello
new- yorkais faisait pour la seconde fois - la première, c'était en 1978, lors d'une excursion dans l'univers bergmanien avec le sombre Intérieurs - une entorse à ses habitudes : il ne
joue pas dans son film. La Rose pourpre est sans aucun doute l'oeuvre la plus ambitieuse du cinéaste, une oeuvre d'une poésie rare que Cocteau - on peut le présumer sans gêne - eût sans
doute appréciée. Jusqu'alors, on avait adoré la plume surdouée du scénariste. La mise en scène, à la limite, on s'en fichait un peu. Il savait confortablement filmer Central Park, Times Square,
les saisons, ça nous convenait. Woody Allen nous faisait rire, nous rendait intelligents. Que demander de plus ? Bien entendu, le noir et blanc de Manhattan ou de Broadway Danny
Rose avait surpris : le cinéaste le plus bavard de la planète utilisait la pellicule des films muets. Car Woody Allen est avant tout un immense cinéphile, et La Rose pourpre un
remarquable hommage à la magie du septième art, un époustouflant exercice de style technique sur le rêve. Le credo du film pourrait se résumer à cette phrase : « Les êtres vivants voudraient
que leur vie devienne fiction, et les êtres de fiction voudraient qu'elle devienne réelle. » C'est l'histoire, dans les années 30, d'une femme qui s'ennuie. Elle s'appelle Cécilia. Pour
tromper sa mélancolie, elle passe son temps au cinéma. Alors qu'elle regarde pour la huitième fois un mélo, La Rose pourpre du Caire, un des acteurs du film, Tom Baxter, sort de l'écran
pour la rejoindre. Dans la salle, c'est la stupéfaction. Pour Tom aussi, plein d'innocence, qui s'aperçoit, par exemple, que dans la réalité, un baiser ne s'achève pas par un fondu au noir...
Entre la réalité et la fiction, que choisir ? Telle est la question que pose ce film, quand bien même nous savons que la folie commence quand on vit hors du réel. La Rose pourpre du
Caire compte parmi les plus grands films sur le cinéma. Quand Cécilia dit à Tom, qui a traversé l'écran pour elle : « Tu parles comme dans un film », on ne peut que saluer le génie
enchanteur de Woody.